Réagir au langage non verbal en face à face

Les mots ne disent pas toujours la vérité. "Oui, d’accord !" peut exprimer "peut-être". Nous laissons souvent échapper ces messages non-verbaux par négligence, pudeur ou crainte de s’aventurer en terrain périlleux. Légitime… mais l’on passe alors à côté de l’essentiel.
À retenir
Regarder pour différencier
Il est tentant de croire que l'autre est dans la même tonalité émotionnelle que nous : je suis satisfait, il l'est aussi ! 
Aussi, repérer les signaux qui traduiraient au contraire que nous ne sommes pas en phase demande beaucoup d'attention et presque un œil neuf : découvrir sa façon à lui de recevoir le message et de la reconnaître.
Formuler l'implicite
Formuler ce que l'on observe avec (grande) prudence ! 
L'émotion arrive souvent avant les mots et notre interlocuteur peut être surpris, déstabilisé de ce que nous lui renvoyons de lui. On peut aussi se tromper. 
L'hypothèse est préférable à la certitude.
Dévier la trajectoire
Si l'émotion de l'autre nous étonne, alors elle devient le sujet central de l'échange. Ce qui existait avant (mes présupposés, mon plan d'actions…) disparaît, au moins pour un temps.
Je m'entraîne
Voici quelques affirmations sur le langage non verbal. Vrai ou faux ?
Les mots ne comptent que pour 7% dans la conversation, suivis par 38% pour la voix, 55% pour la gestuelle et les expressions faciales
Faux. Ces chiffres émanent d’une étude menée par Albert Mehrabian, psychologue Américain, dans les années 1970. Ils sont considérés comme “exagérés et suspects” par des spécialistes du langage non verbal tels que Judee Burgoon, David Buller, et Gill Woodall. Albert Mehrabian était lui-même très embêté de la généralisation abusive et de la médiatisation de ses résultats.
Croiser les bras est un signe de fermeture au dialogue
Faux : un geste s’inscrit dans un contexte, dans un système plus large (le corps, l’attitude générale…). Croiser les bras peut traduire une position d’attention, d’écoute, de repos etc.
Une personne, qui, répondant à une question, regarde vers la droite est en train de mentir
Faux. Cette croyance, issue de la programmation neuro-linguistique est à prendre avec précaution car de multiples facteurs influent sur les mouvements latéraux de notre regard : notre culture, une propension naturelle à regarder à droite lorsque l’on répond à une question, le stress, l’attirance pour un objet dans notre champ de vision etc.

Conseil du coach

Lutter contre la focalisation rigide

L'histoire du gorille sur un terrain de basket : comment ne pas voir ce qui devrait s'imposer à nous ?
Chronique : L'expression des émotions est-elle universelle ?
Postures, mimiques, intonation et rythme de la voix, silences, odeur, tout en nous communique, même lorsque nous ne disons rien...
Le "non-verbal", une forme de communication qui « parle » sans les mots... et continue de nous interroger.

Depuis le XIXème siècle, sur les pas de Charles Darwin, anthropologues et ethnologues soutiennent que les expressions faciales des émotions seraient innées plutôt qu'apprises.
On parle d'invariance culturelle.

David Matsumoto, chercheur en psychologie à l'université de San Francisco, compare les visages de judokas, voyants et non-voyants, aux jeux olympiques et paralympiques de 2004. Plus de 4800 photos d'athlètes de 23 pays sont analysées.
 

 
 
 
 
 

 
 
 
Il constate que les personnes aveugles et voyantes expriment de la même façon, lors de la remise des médailles, leurs émotions. Par exemple, 85% des médaillés d'argent produisent un "sourire social". Ce sourire qui n'utilise que les muscles de la bouche, alors que dans le sourire « vrai », dit sourire de Duchenne, les yeux deviennent étroits et les joues s'élèvent. Les perdants, eux, bougent leur lèvre inférieure vers le haut comme pour contrôler l'émotion sur leur visage.
"La corrélation statistique entre les expressions des personnes non-voyantes et voyantes est presque parfaite", s'étonne Matsumoto.

Paul Ekman, en 1980, à l'issue d'une étude sur des aborigènes de Nouvelle-Guinée, plaidait déjà en faveur de l'universalité des expressions faciales des émotions : il avait détecté plus d'une quarantaine d'unités faciales innées (ouverture de la bouche, froncement de sourcils…), dont les combinaisons forment les manifestations de la joie, de la tristesse, de la colère, de la peur, du dégoût et de la surprise.

"Ce que tu es crie si fort que je n'entends pas ce que tu dis". 
Ralph Waldo Emerson
Certes, on ne peut ignorer la variété, à l'intérieur d'une même culture, voire chez un même individu, des expressions faciales. Elle est notamment due à la simultanéité des mouvements intentionnels, signes conventionnels et des signes spontanés traduisant l'état émotionnel. Ainsi, l'individu peut essayer de contrôler son visage pour simuler, dissimuler ses émotions mais cela est très difficile.

On pense parfois que décoder le « non verbal » est affaire d'experts qui nous livreraient les secrets de l'âme d'autrui ! Ce n'est pas le cas et ces interprétations plaquées sont par ailleurs pernicieuses.
En revanche, nous apprenons à saisir, depuis que nous sommes nés, le langage corporel qui s'exprime dans chaque interaction. Certes, nous n'avons pas de "recette" pour lire chaque expression mais des "antennes" aiguisées par l'expérience pour donner du sens à ce qui est dit et non dit !

Catherine Barbon pour le Gymnase du Management

 
 
 

 
 
 
Je m'évalue
Voici maintenant 3 questions pour tester vos acquis.
A chaque question une seule bonne réponse mais attention, il y a parmi les réponses possibles, une "presque bonne" qui pourrait vous faire hésiter !
1 / 3   Baillements
Vous présentez un projet à votre N+1; il baille. Que lui dites-vous ?
Rien. Il est peut-être tout simplement fatigué.
Possible. Mais en tête à tête, mieux vaut s'assurer que ce n'est que cela.
Vous lui demandez : "le projet ne t'intéresse pas ?"
Abrupt et vous risquez de le mettre mal à l'aise.
Vous l'interrogez : "as-tu d'ores et déjà des remarques ou questions ?"
Oui, c'est une façon discrète de l'impliquer.
2 / 3   Un vrai oui ?
Vous demandez à Jeanne, votre collaboratrice, de réaliser une tâche importante pour lundi prochain. Elle répond "oui" en baissant la voix et vous sentez que ce n'est pas un "oui" franc. Que lui dites-vous ?
OK, je compte sur toi.
Insuffisant; votre demande n'a pas valeur d'engagement.
Ton "oui" n'est pas un "oui" franc, vas-tu vraiment le faire ?
Un peu brutal. Jeanne risque de répondre "oui oui".
Vois-tu déjà comment tu vas t'organiser pour tenir le délai ?
Oui, vous l'amenez à se projeter et à exprimer ses éventuels freins. 
As-tu besoin d'aide pour y arriver ?
Pourquoi pas mais un peu tôt. Mieux vaut d'abord savoir comment elle compte s'y prendre.
3 / 3   Changement d'attitude
Ted est, depuis quelques jours, beaucoup moins souriant que d'habitude. Que lui dites-vous ? 
Tu sembles préoccupé en ce moment...
Oui, ce simple constat non accusateur suivi d'un silence peut suffire à lancer l'échange.
Tu es moins souriant en ce moment, as-tu des problèmes ?
Trop direct, cela peut braquer Ted. 
(sur un ton enjoué) Si ça continue, je vais aller t'acheter un sourire pour retrouver le Ted d'avant !
Si vous ne savez pas ce qui lui arrive, mieux vaut éviter l'humour qui pourrait tomber à côté.
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